Pourquoi l’essor des rebouteux et des magnétiseurs ?

Depuis quelques temps, le recours à certaines PSNC, comme le magnétisme, semble s’amplifier. Pourtant, ces pratiques ne sont pas reconnues, que ce soit par les études scientifiques, la médecine conventionnelle, ou l’Etat qui n’en délivre aucun diplôme officiel.

Pour expliquer le recours croissant à ces pratiques, la défiance accrue envers la médecine et l’aggravation de la désertification médicale seraient à mettre en cause. Un article récent du Parisien expose ainsi la situation dans l’Oise où, comme dans le reste de la France, des personnes de tous horizons officient comme magnétiseurs ou rebouteux. Ils pratiquent dans leur garage réaménagé en cabinet, table de massage incluse, et diffusent parfois des prospectus aux prétentions audacieuses : chez certains on « allège la douleur de 50 à 90 % », en mobilisant des techniques de massage capables d’« oxygéner les muscles, les nerfs ou les ligaments ».

Certains sont d’anciens professionnels de santé, comme cette ex-infirmière qui ne supportait plus ses conditions de travail, ou cet ancien ergonome, devenu magnétiseur. La reconversion est rapide : une formation de six jours et la création d’un statut d’autoentrepreneur. Dans l’Oise, on constate donc la multiplication des installations de praticiens en tout genre. La concurrence est rude : biorésonance, reboutologie, naturopathie… A titre d’exemple, Le Parisien a comptabilisé une trentaine de magnétiseurs dans le département.

Comme le souligne Donatien Le Vaillant, chef de la Miviludes, « les dérives sectaires les plus graves se produisent généralement dans des endroits reculés ou isolés ». Bien que les zones urbaines puissent aussi être touchées par la désertification médicale, les zones rurales sont particulièrement propices à l’organisation de salons de bien-être ou de stages onéreux dans des lieux isolés. Les difficultés d’accès aux soins participent à une insécurité sanitaire, qui favorise évidemment le recours à ces PSNC. Comme le souligne un médecin généraliste interrogé par Le Parisien, la densité médicale diminue depuis 20 ans dans l’Oise, sans mesure concrète. Difficile alors de savoir vers qui s’orienter, d’autant que la frontière entre PSNC et médecine n’est pas toujours étanche. La confusion est parfois accentuée par des structures de soin comme les Maisons de Santé Pluriprofessionnelles (MSP). Si elles sont légalement censées n’accueillir que des professionnels de santé, certains tentent un élargissement des règles, comme ce maire souhaitant créer une MSP hébergeant un médecin généraliste et de plusieurs sophrologues et psychanalystes. Le projet a bien entendu essuyé un refus clair de l’ordre des médecins de l’Oise. 

D’autres pistes permettent d’expliquer l’essor de ces pratiques, comme la réduction du temps médical, l’engouement autour du développement personnel et la défiance envers la médecine conventionnelle, démultipliée depuis l’épidémie de Covid-19. On constate également une multiplication des maladies chroniques et de symptômes parfois courants, dont la prise en charge peut s’avérer complexe : insomnie, stress, troubles digestifs… Dans la clientèle des praticiens, on trouve également beaucoup de douloureux  chroniques dont les souffrances sont réfractaires aux traitements conventionnels.

Face aux risques de dérives, des praticiens de PSNC s’inquiètent des formations hasardeuses suivies par certains de leurs confrères. C’est par exemple le cas de cet homme, dont la pratique bénévole vise à tenter de limiter les effets indésirables des traitements anti-cancéreux. Son positionnement est clair : il ne cherche surtout pas à se substituer au médecin et s’inquiète au contraire des risques de dérives, en particulier pour des personnes atteintes de maladies chroniques ou graves, que leur pathologie peut vulnérabiliser face à des praticiens malintentionnés. 

(Source : Le Parisien, 04.11.2023)

  • Auteur : Unadfi