Le regard d’une fille sur son père gourou

Kalina Bertin, jeune réalisatrice canadienne de 28 ans, a découvert par hasard que son père, Georges Patrick Dubie, qu’elle n’avait revu qu’à de rares occasions depuis l’âge de six ans, était le gourou d’une secte, Les Significants, et avait été condamné pour escroquerie. Dans son documentaire Manic, elle étudie, à travers ses rencontres avec d’ex adeptes comment la personnalité chaotique de son père avait affecté la sienne et celle de ses deux frères et de sa soeur.

Sur son certificat de naissance, le père de Kalina Bertin porte le nom de Douglas Winter. Elle garde de ses premières années, de bons souvenirs de lui qui malgré ses nombreuses absences, était plutôt dévoué à ses enfants. Tantôt tendre tantôt colérique, elle comprendra plus tard, lorsque son frère sera diagnostiqué bipolaire que son père souffrait du même trouble. Elle est la seule des quatre enfants à en être épargné. Kalina s’est maintes fois demandé à quel point le trouble bipolaire dont souffrait son père avait pu l’amener à se penser la réincarnation du Christ et à fonder son groupe.

Les Significants, la communauté hippie qu’il a crée dans les années 1970 à Hawaï, comptait plus de 200 membres au plus fort de sa notoriété. Selon Kalina, son père était un maître dans l’art de l’affabulation. Il avait réussi à réunir autour de lui des gens aisés auxquels il faisait croire qu’ils étaient les réincarnations de personnages bibliques tels que Moïse, Marie-Madeleine… Croyant à la fin du monde, le groupe s’était préparé en volant et en cachant plus de 100 000 dollars de marchandises, ce qui a valu une condamnation à Georges Patrick Dubie. Passé également maître dans l’art de l’escroquerie, il avait convaincu la fille de sa maîtresse de se raser la tête pour faire croire à sa guérison miraculeuse grâce à des produits naturels. Au cours de sa vie rocambolesque, il se fit passer pour un réalisateur, épousa Geri Cvitanovich, la cofondatrice d’Herbalife, qui intenta un procès aux descendants de Dubie pour récupérer l’argent qu’elle lui avait donné.

Kalina Bertin a su qu’elle avait quinze demi-frères et soeurs à la mort de son père, en 2006, assassiné par Magaret Crane, sa maîtresse et mère de cinq de ses enfants. Selon des témoignages, la conception d’enfants n’avait d’autre but que de garder leur mère sous sa coupe. Il usait de violence à leur égard. Angel Crane, l’une de ses filles partie vivre avec lui à Hawaï, a été réduite en esclavage, privée de sommeil et de nourriture et n’a reçu aucune éducation.

(Sources : Le Devoir, 13.11.2017 & Vice, 19.11.2017)