Un long cheminement vers la sortie

Jodie Chapman, une ancienne Témoin de Jéhovah, vient de publier un livre en anglais1 dans lequel elle raconte son long cheminement et le déclic qui l’ont conduite à quitter le groupe.

Prendre la décision de se retirer de sa congrégation lui a coûté cher. Certains membres de sa famille ne lui parlent plus. Étant née dans le groupe, la décision de partir l’a amenée à réfléchir sur son identité, à essayer de trouver comment vivre sa vie maintenant qu’elle la contrôle enfin. 

Ce genre de questionnement n’existait pas chez les Témoins de Jéhovah. Depuis son enfance « chaque instant de chaque jour était régi par les règles de la foi » basées sur une lecture littérale de la Bible. La croyance en la fin du monde, à laquelle eux seuls survivront, occupait une place centrale.
Baignant en permanence dans l’apocalypse, à l’école elle imaginait tous les enfants gisant sur le sol, mais cela ne l’effrayait pas, car elle croyait qu’elle allait vivre éternellement.
Elle n’avait pas le droit de fêter ses anniversaires, ni d’aller à ceux des amis car rien dans la Bible ne dit que Jésus le faisait. Les fêtes de Noël et Pâques étaient interdites car basées, selon eux, sur des coutumes païennes.
Tout cela la faisait se sentir différente des autres enfants, mais n’avait pas d’importance car chez elle, comme à la Salle du Royaume, on lui avait appris « qu’il était bon d’être différent parce que cela signifiait qu’elle allait être sauvée quand Armageddon serait venu ».
L’activité qui lui a le plus pesé était le porte à porte. Ceux qui ouvraient, étaient plus rares que ceux qui les rabrouaient. Mais les insultes et le rejet n’entamaient pas sa foi, elle avait pitié d’eux.

Son point de vue sur la religion a commencé à changer à l’adolescence. Elle a vu de nombreux chemins se fermer. Elle voulait être critique de cinéma, mais on l’a découragée d’aller à l’université afin de lui éviter de faire une mauvaise utilisation du temps des derniers jours.
Elle a compris qu’elle « n’aurait jamais la liberté de vivre sa vie selon ses propres conditions ».

Alors à 17 ans, en 2001, elle a décidé de s’éloigner de la religion. Mais on l’a prévenue que si elle partait, les membres de sa congrégation, y compris sa famille, couperaient tout contact avec elle. « Ce chantage émotionnel, explique-t-elle, est considéré comme un amour dur par les Témoins ». Elle est restée et en 2005, s’est mariée avec un autre membre de la communauté (parti plus tard avec elle). Mais étant photographe de mariage et voyageant beaucoup pour son travail, elle a été considérée par les autres « comme une sœur avec opinions » !

Lorsqu’elle est devenue mère et a réalisé qu’elle devait transmettre ce mode de vie à ses enfants, elle s’est sentie mal à l’aise. Et le scandale australien qui a mis en lumière de nombreux abus sexuels couverts par la hiérarchie jéhoviste pour protéger l’institution n’a fait qu’accroître ce malaise.

Le déclic final est survenu en 2017, alors qu’elle était enceinte de son troisième fils. Lors d’une réunion du dimanche, elle a lu « une brochure qui encourageait les femmes battues à endurer tout abus ». C’ en était trop, elle ne pouvait plus élever ses enfants de façon là.
Après plusieurs nuits blanches à s’interroger sur les réactions de sa famille, elle a quitté le groupe avec sa famille.

(Source : Dailymail, 03.04.2021)

1-Another Life, Jodie Chapman, Penguin Michael Joseph, mars 2021

  • Auteur : Uandfi