La Scientologie sur la sellette

Catherine Picard, présidente de l’UNADFI, interrogée par le journal haut-normand

Présidente depuis 2004 de l’UNADFI, Catherine Picard connaît bien la Scientologie. Elle rappelle que cette dernière s’est implantée petit à petit en France et les médias ont commencé à s’y intéresser lorsqu’elle a développé des thèmes attractifs tels que la lutte contre la toxicomanie, la réhabilitation des prisonniers et le bénévolat des jeunes… Il y a deux ans, à Evreux, la Scientologie a monté un stand dans le quartier de La Madeleine à Evreux, stand qui n’a pas remporté le succès escompté. Mais il s’agissait, ajoute Catherine Picard, d’une « opération d’extériorisation ».

Reste que derrière cette communication de façade, la Scientologie est d’abord une méthode, la Dianétique, centrée sur un questionnaire de personnalité de 250 questions distribué notamment à la sortie du métro. Il s’agit d’une méthode d’emprise destinée à placer le futur adepte « en position d’infériorité avant de lui proposer de le remettre dans le droit chemin en s’appuyant sur le code de vie de la Dianétique ». Ce système induit une « clôture avec le passé pour une renaissance avec un autre système ».

La présidente de l’UNADFI ajoute que cette emprise ne peut s’effectuer que si le temps de l’adepte est entièrement occupé par des activités obligatoires qui le décentrent complètement de la vie sociale. Le seul objectif de l’adepte est « d’aller de l’avant selon les préceptes de l’association » et d’accéder au niveau supérieur.

La Scientologie a pourtant perdu en crédibilité au fil du temps et la médiatisation « anti-scientologie » est maintenant bien réelle. La vingtaine de procès en cours en France, ainsi que les nombreuses affaires judiciaires aux USA, écornent l’image de l’organisation. En conséquence, les politiques américains seront peut-être moins sensibles aux lobbyings pro-scientologues, contrairement à ce qui se passe actuellement à la Commission européenne où ce type d’opérations fonctionne toujours.

En conclusion, note Catherine Picard, la Scientologie dont l’image est mise à mal laisse présager « une vague descendante » mais ses « pions » restent bien placés…

 

Religion ou pas ?

Aux Etats-Unis, la Scientologie a obtenu un statut d’exonération fiscale en 1993, alors qu’en France où existe la séparation de l’Eglise et de l’Etat, l’organisation n’a jamais demandé le statut d’association cultuelle…

| POUR EN SAVOIR PLUS : SCIENTOLOGIE, AUTOPSIE D’UNE SECTE D’ETAT

Le livre du journaliste Emmanuel FanstenScientologie, autopsie d’une secte d’Etat, Emmanuel Fansten, Editions Robert Laffont, 2010]] explique le système mis en place par le fondateur, Ron Hubbard. A partir de notes confidentielles et de nombreux témoignages, l’auteur dévoile « une grande part du mystère scientologue »… Il s’agit là de l’une des rares enquêtes publiées sur la Scientologie.

[Pour plus d’informations sur cet ouvrage |

 

Gloria, une possible victime de la Scientologie

Secrétaire dans une entreprise d’Evreux, Gloria Lopez était devenue dépressive suite à son divorce. Un collègue de travail l’invite alors à rencontrer des scientologues. Ensuite, elle suit un chemin très classique, trouvant « un milieu très convivial, très accueillant, une écoute et des solutions à ses problèmes ». Elle annonce son « engagement » à son ex-mari, Pascal Le Berre qui constate qu’elle semblait très heureuse, très épanouie et « rayonnante ». Peu à peu Gloria se construit un réseau exclusivement formé de membres de l’organisation.

Pendant plusieurs années, elle vit sa nouvelle vie et décide de s’installer à Paris. La maison qu’elle habitait toujours avec ses deux enfants est mise en vente. Mais tout l’argent sert à rembourser un emprunt destiné à financer ses cours scientologues, cours toujours plus onéreux.

Parisienne, Gloria travaille pour une entreprise scientologue puis intègre un cabinet d’avocat sans relation avec la Scientologie. Elle passe beaucoup de temps « à distribuer des tracts et à faire de la propagande », son objectif étant de devenir salariée de l’organisation. Elle finit par laisser la garde de ses deux enfants à son ex-mari.
L’euphorie va durer jusqu’en 2005. Elle engloutit ensuite un héritage toujours dans la perspective de progresser dans la carrière scientologue puis, l’été 2006, rejoint le centre européen de la Scientologie à Copenhague. Elle en revient « transformée » et mécontente d’elle-même. Elle sombre dans une dépression et le
21 décembre 2006, se jette sous un train en gare de Colombes.

LA FAMILLE DE GLORIA DANS L’ATTENTE DU PROCES

Une enquête préliminaire au parquet de Nanterre a été ouverte. Selon Maître Bosselut, l’avocat de l’ex-mari et des deux enfants de Gloria Lopez, le procès pourrait avoir lieu d’ici la fin de l’année. Pour la famille Le Berre, la Scientologie porterait la responsabilité du suicide.
Les enfants de Gloria Lopez ont porté plainte notamment pour escroquerie et non-assistance à personne en danger et depuis 2008, « l’enquête suit son cours ». Les scientologues avaient bien tenté d’empêcher les poursuites en proposant un arrangement financier mais la famille Le Berre avait refusé.
Au domicile de Gloria, la famille avait retrouvé de nombreux documents dont un journal intime… mais pas la moindre lettre à ses enfants. Ce que son ex-mari juge « vraiment bizarre » d’autant plus qu’une scientologue se trouvait dans l’appartement de Gloria lorsque les parents espagnols de cette dernière sont arrivés…

| C’EST QUOI, UN ELECTROMETRE ?

Cet appareil, un simple ohmmètre, a été créé par Ron Hubbard. Il fait passer un faible courant électrique dans le corps de l’adepte. Son utilisation est basée sur la croyance que des images mentales peuvent faire dévier l’aiguille de l’électromètre…
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Source : Le Démocrate, Patrick Auffret, 04.05.2011