La Cathédrale de la foi

Près de Yaoundé, près d’un millier de fidèles en transe vont déposer, genou à terre, des billets de banque dans un panier. Ils obéissent docilement au présage de leur pasteur Dieunedort Kamdem : « Si vous ne donnez pas 10% à Dieu, le diable prendra 90% ». Ce pasteur, fondateur de la Cathédrale de la Foi, vend du rêve à une population désespérée par le chômage et les difficultés d’accès aux soins.

À 38 ans, Dieunedort Kamdem a des allures de dandy anglais qui n’hésite pas à célébrer la messe dans un costume rouge vif. Il se présente comme le « général de Dieu ». Dans la capitale camerounaise, il jouit d’un statut de quasi-rock star et écume les plateaux de télévision pour vanter les mérites « d’une église décomplexée quant aux questions d’argent ». Il soutient que la « vraie église de Dieu doit être un facteur de développement et de prospérité ». Pour lui, « la richesse et les biens matériels sont tout aussi importants que le salut de l’âme ».
 

Issu d’une famille animiste, Dieunedort Kamdem aurait trouvé la foi à l’âge de 11 ans après avoir, dit-il, ressuscité. L’adolescent fréquente alors des groupes
du Renouveau charismatique. Il est consacré pasteur à 17 ans après avoir obtenu un diplôme de théologie délivré par une école fondée par le pasteur évangélique américain, Don Hawkins. Il a été l’un des premiers camerounais à lancer des campagnes d’évangélisation à l’américaine dans son pays.
 

Depuis la fondation de sa Cathédrale de la Foi en 2010, Dieunedort Kamdem revendique plus de 10 000 fidèles dans l’ensemble des 32 églises qu’il a ouvertes au Cameroun. Il est à la tête de la Kanodi Ministry Communication, de quatre stations de radio, d’un journal, d’une chaîne de télévision et d’une école de formation de pasteurs, la Faith Bible Institute. Il dirige cent douze pasteurs et 500 bénévoles qui sont entretenus par l’église.

Dieunedort Kamdem ne donne pas de chiffres précis sur les comptes de son église mais a déclaré percevoir 400 000 francs CFA par mois (600 euros)1 alors que son train de vie semble bien supérieur. Les dons sont vivement encouragés mais le tintement des pièces dans les corbeilles est interdit, il porterait malheur et dérangerait « le Tout-Puissant ». Une consigne qui pousserait les ouailles à ne déposer que des billets…

(Source : Le Monde, 25.12.2015)

1- Soit sept fois et demi le revenu moyen d’un fonctionnaire camerounais