L’évangile de la prospérité

Selon Kate Bowler, professeur de religion, l’évangile de la prospérité est « la croyance que Dieu accorde la santé et la richesse à ceux qui ont la foi ». Aujourd’hui, l’Amérique semble divisée entre ceux qui y croient fermement et ceux qui rejettent cette croyance et la qualifie de théologie frauduleuse et puérile. Les études de Kate Bowler ont montré que l’évangile de la prospérité est de plus en plus ancré dans la culture américaine. Comment expliquer cette évolution ?

L’évangile de la prospérité repose sur le principe que Dieu veut que nous vivions. Mais afin de recevoir des dons du « créateur », il faut démontrer sa foi et réclamer la prospérité qui nous revient de droit et « en abondance ». Cette théorie est largement reprise par les télévangélistes, ces prédicateurs qui, à travers des émissions tonitruantes, incitent les téléspectateurs à envoyer des dons en échange de quelques bénédictions.

L’évangile de la prospérité est aussi la théorie du miracle. Bon nombre d’américains sont persuadés d’avoir échappé à des catastrophes ou des maladies grâce à une intervention divine. Menacé par une série de tornades meurtrières au Texas en décembre 2015, un adepte a déclaré que Dieu, « qui a autorité sur les vents », avait déplacé une tornade pour le sauver.
L’évangile de prospérité trouve ses origines dans un mouvement du 19e siècle, la Nouvelle Pensée, affirmant que la santé et la fortune peuvent être obtenues grâce à la pensée positive. Ce mouvement survit de nos jours grâce à des livres comme Le Secret, vendu à plus de 19 millions d’exemplaires.

Kate Bowler attribue à EW Kenyon la création de cette nouvelle théologie. Au début du 20e siècle, ce pasteur a combiné la Nouvelle Pensée avec la Bible. L’évangile de la prospérité s’est répandu après la seconde guerre mondiale par des évangélistes populaires et a été assimilé au pentecôtisme.

Aujourd’hui, nombre de télévangélistes sont controversés : Joel Osteen refuse l’étiquette d’évangile de la prospérité mais promet des récompenses financières à ses adeptes. En 1991, « PrimeTime Live » sur ABC a dénoncé l’effet dévastateur de Robert Tilton qui envoie à ses donateurs de « l’huile sainte » ou autres petits « souvenirs » pour que leurs prières soient exaucées. Les journalistes ont retrouvé dans une benne à ordure les courriers non lus des croyants qui demandaient simplement de l’aide. La célèbre Oprah Winfrey a, quant à elle, été accusée de promouvoir cette théologie en influençant des auditeurs à qui elle suggère d’adopter une « attitude positive ».

Mais l’évangile de la prospérité se propage en dehors des frontières des États-Unis. Des pays comme le Brésil ou le Nigéria abritent les pasteurs les plus riches de la planète.
En 2015, dans un éditorial du Times, Kareem Abdul Jabar s’est déclaré en guerre contre cette théorie qui exploite les espoirs des pauvres et des désespérés.
L’étude de Kate Bowler montre que l’évangile de la prospérité comme système de contrôle de la pensée s’explique par la vulnérabilité des adeptes qui souffrent pour la plupart de troubles anxieux ; il fonctionne comme une thérapie.

Ses conclusions plutôt bienveillantes ont fait réagir ses détracteurs qui estiment que la chercheuse a minimisé les conséquences des exactions de figures comme Tilton.

(Source : The Conversation, 01.05.2016)

Lire aussi sur le site de l’UNADFI :

– Néo-pentecôtisme et vulnérabilité aux dérives sectaires : https://www.unadfi.org/groupe-et-mouvance/neo-pentecotisme-et-vulnerabilite-aux-derives-sectaires-0

– Le CNEF et l’Evangile de la Prospérité :
https://www.unadfi.org/groupe-et-mouvance/le-cnef-et-l-evangile-de-la-prosperite