Yoga et méditation à l’école : le religieux s’introduirait-il dans l’espace public ?

Aux Etats-Unis, le nombre d’enfants pratiquant le yoga est passé de 1,3 millions à 4,9 millions en 10 ans ; même progression pour la méditation. Cette hausse est étroitement liée à l’introduction de ces pratiques dans les écoles. Il y en aurait 940, de la maternelle au lycée.

Candy Gunther Brown, professeur d’études religieuses, pense que leur présence au sein des écoles pose un problème pour des raisons éthiques et légales. Pour beaucoup, le yoga et la Méditation pleine conscience ne sont pas d’ordre religieux, mais il serait plus juste de dire que ces pratiques ont été sécularisées.

Cette confusion entre pratique religieuse et pratique laïque est souvent constatée. La Yoga Alliance, organisation se présentant comme la « plus grande association à but non lucratif représentant la communauté du yoga », a soutenu en 2014 que ses studios de yoga devraient être exemptés de taxes dans le cadre de l’exonération des mouvements religieux, car le yoga a pour objectif « la spiritualité plutôt que la forme physique ». Mais quand les parents ont intenté une action en justice pour interdire le yoga dans un établissement scolaire, la même Yoga Alliance a nié que le yoga ait un caractère religieux.

Dans certaines affaires judiciaires, les tribunaux ont conclu que le yoga et la méditation étaient des pratiques religieuses. Comme le montre l’affaire « Malnak contre Yogi » dans laquelle un tribunal a jugé que la Méditation transcendantale avait un caractère religieux interdisant son entrée dans un lycée. Dans ces affaires, la justice a rappelé que les écoles publiques ne pouvaient encourager les pratiques religieuses en leur sein.

Les promoteurs de la Méditation pleine conscience comme Jon Kabat Zinn usent de formules ambiguës pour définir leur pratique, car pour eux ce n’est qu’une question de vocabulaire. Tara Guber, fondatrice de Yoga Ed., admet avoir procédé à des modifications sémantiques pour intégrer sa pratique dans une école publique, devant l’opposition des parents.

Des recherches montrent pourtant que même présentées de façon « laïque », ces pratiques ont des effets sur la spiritualité. Plus de 62% des pratiquants de yoga « profanes » admettent avoir évolué dans leur motivation : partis d’une volonté d’exercer une activité physique, ils ont fini par y trouver des raisons plus spirituelles.

Candy Gunther Brown pense que le respect de la diversité culturelle et religieuse ne peut pas se dispenser du consentement éclairé des personnes. La pratique du yoga et de la pleine conscience dans l’enceinte de l’école pourrait être tolérée à condition que les élèves soient libres de participer ou non.

(Source : The Conversation, 13.05.2019)