Peines de prison requises pour la « prêtresse » vaudou et ses complices

Mélitte Jasmin, « prêtresse » vaudoue, ses deux filles et son mari ont comparu devant le tribunal correctionnel de Pontoise (95) pour abus de faiblesse sur personnes en état de sujétion psychologique et actes de barbarie sur animaux domestiques. Dans son temple de Marly-la-Ville (95), on pratiquait le sacrifice d’animaux et la purification par le sang. Lors du procès, quatorze anciens adeptes s’étant portés partie civile ont expliqué avoir été humiliés, financièrement ruinés et pour certains maltraités.

Ce procès est la conclusion d’une information judiciaire ouverte en novembre 2008 sur les activités de voyante, guérisseuse et grande prêtresse animiste que Mélitte Jasmin exerçait depuis 1989. Les adeptes, d’origine antillaise, venaient de toute l’Île-de-France pour assister à de somptueuses, mais sordides ,cérémonies et étaient complètement dévoués à celle qui se faisait appeler « maman ».

Dès les premières plaintes en 2006, les anciens adeptes dénoncent des extorsions de fonds et une forte emprise psychologique. Ils décrivent une structure très hiérarchisée : les fidèles réunis constituent la « société » ; parmi eux figurent les « initiés debout » et les « initiés couchés ». L’argent est également au coeur du fonctionnement de la secte : 100 euros la consultation, 3 000 pour obtenir un travail, jusqu’à 12 000 pour une initiation. Par crainte des représailles, les victimes hésitent à se faire connaître. Au final, sur la centaine d’adeptes entendus par les enquêteurs, une trentaine de plaintes sont enregistrées. En 2009, une première vague d’interpellations est menée qui aboutit à la mise en examen de la gourelle, de son mari et de leurs deux filles jumelles.

Cette femme décrite comme autoritaire par les adeptes les empêchait d’avoir recours aux soins médicaux ou encore les obligeait à travailler bénévolement.
Louise était la bonne à tout faire et la tête de turc de Mélitte Jasmin : « elle me maltraitait. Elle m’a fait beaucoup de mal. J’essayais de tout faire bien pour qu’elle soit fière de moi. Mais tous les jours il y avait des réprimandes. Elle me frappait et m’insultait devant tout le monde (…) Les gens la croyaient et me tournaient le dos » a-t-elle déclaré. Elle dénonce également des relations sexuelles imposées, des viols qui ont fait l’objet d’un non-lieu : « Elle m’a embrassée sur la bouche (…) Nous avons eu des rapports forcés ». Face à ces accusations, Mélitte Jasmin donne sa propre explication : c’est Louise qui se jetait « sur la divinité », le « saint » qui s’exprimait à travers elle.

Le procureur a estimé que cette femme feignait de ne « pas comprendre l’objet de son procès », se retranchant derrière « les exigences du culte de ses ancêtres, une religion des descendants d’esclaves ».
Pour Catherine, restée 18 ans sous l’emprise de Mélitte Jasmin : « Le procureur a su expliquer tout ce que nous avons vécu, toute notre souffrance ». Comme la majorité des parties civiles, Catherine était entrée dans le temple avec ses parents en proie à des difficultés liées à la perte de deux de leurs enfants.
Me Frédéric Aguillon, avocat de plusieurs parties civiles a décrit le mécanisme d’emprise de la prêtresse vaudoue sur ses adeptes. « Après avoir trouvé du réconfort dans le temple, les adeptes sont infantilisés (ils l’appellent Maman) de façon à les annihiler. Puis vient le parcours initiatique qui permet d’ancrer la soumission et qui entraîne la perte de contrôle de sa propre vie. »

Le parquet a requis cinq ans de prison dont deux avec sursis contre Mélitte. Ses filles et son mari ont été condamnés respectivement à trois et deux ans de prison dont un avec sursis, pour complicité et recel. Le tribunal a également ordonné la confiscation du patrimoine immobilier du couple : trois maisons d’une valeur estimée à près de 900 000 euros. Toutes les victimes ont demandé une indemnisation financière au titre du préjudice moral.

(Sources : Le Parisien, 15 et 18.02.2016 & Outre Mer 1ère, 16 et 19.02.2016)

[Dans cette affaire, l’UNADFI est intervenue en tant qu’expert auprès des gendarmes en charge des interventions.]