Les difficultés de la protection de l’enfance à intervenir en milieu sectaire

Blâmé par la Commission des droits de la personne, le Département de protection de la Jeunesse du Québec (DPJ) a été mis en cause dans l’affaire du pasteur baptiste, Claude Guillot1. Dans son rapport d’enquête, la commission reproche au DPJ de ne pas avoir agi alors qu’il détenait des informations depuis 2004.

Le pasteur de l’église baptiste de Québec-est, Claude Guillot, avait séquestré cinq enfants qui lui avaient été confiés par leurs parents afin de leur enseigner les préceptes du groupe et sa discipline. Entre 1983 et 2014, ils ont vécu dans l’isolement le plus total, dans le sous-sol du logement du religieux. En 2015, le DPJ découvrait que les enfants avaient été violentés et torturés.

Le rapport d’enquête de la Commission des droits de la personne révèle que le DPJ avait reçu des signalements dès 2004 puis refermé le dossier en 2006 « sans se prononcer à savoir si la sécurité ou le développement des enfants était compromis ». D’autres signalements lui seraient parvenus en 2005 et en 2013.

Pour sa défense, la directrice du DPJ Québec a évoqué les difficultés à intervenir dans les groupes sectaires : « Quand le DPJ arrive dans des milieux comme les sectes, les enfants sont conditionnés à percevoir le DPJ comme des personnes méchantes. […] Ils ont des réponses formatées à l’avance par les personnes en autorité. » Elle n’a pu intervenir qu’en 2014 après le témoignage d’un jeune garçon âgé de seize ans.

Un ancien pasteur, Paul Leslie, a enfoncé le clou affirmant avoir lui-même dénoncé la situation au DPJ dès 1992. Il avait monté un dossier dans lequel il expliquait que Claude Guillot « donnait des coups de poing [aux enfants], les privait de repas, leur coupait l’eau chaude. »
Les deux organismes ont admis les difficultés à intervenir en milieu sectaire et ont demandé expressément à la ministre concernée de concevoir un guide à cet effet.
L’Association d’Églises baptistes évangéliques au Québec (AEBEQ) reconnaît également de son côté avoir tardé à réagir. Paul Leslie l’avait informée en même temps que le DPJ en 1992. Le directeur de l’AEBEQ de l’époque lui avait alors répondu qu’il « ne devais pas remettre un homme de Dieu en question. »

(Source : Le Devoir, 20.08.2016)

1-Lire sur le site de l’UNADFI, Un pasteur soupçonné de maltraitances sur enfants : https://www.unadfi.org/groupe-et-mouvance/un-pasteur-soupconne-de-maltraitances-sur-enfants