La Sahaja Yoga contrainte de laisser Yoann rentrer en France

Source : BULLES, décembre 1991

« L’enfant perdu de l’Himalaya », « Le séquestré de la Mère divine…» . C’était en mai 1991. Toute la presse alertait l’opinion publique sur le cas du petit Yoann, envoyé et retenu en Inde auprès de Shri Mataji, gourou de la secte Sahaja Yoga.

Shri Mataji

Peu de gens connaissaient jusqu’ici l’existence de la secte Sahaja Yoga et de sa prêtresse Shri Mataji. Celle qui se prend – ou veut se faire prendre – pour «la plus grande autorité spirituelle de notre temps» est née en Inde en 1923. Elle est l’épouse d’un personnage important, secrétaire général de l’organisation maritime des Nations-Unies.

Depuis sa première conférence à Bombay en 1969, elle a multiplié les manifestations en Europe, se disant « inspirée » et déclarant n’être rien moins que la Vierge et/ou la Saint-Esprit. Cet état supérieur se traduit par… «un léger courant d’air au bout des doigts» que tout à chacun peut ressentir, en union avec elle :

«Il n’y a pas besoin que je sois là physiquement, affirme-t-elle. Ma photo qui émet tout comme moi des vibrations peut suffire à une ‘réalisation’, à condition d’être prêt spirituellement.»

 

Yoann envoyé en Inde

La mégalomanie délirante de Shri Mataji n’empêche pas qu’elle recrute et qu’elle convainque. C’est ainsi que parmi ces recrues figurent les parents de Yoann dont la sincérité n’est pas mise en doute et qui dirigent l’Ashram de la Mézières, près de Rennes.

Persuadés que leur fils serait mieux éduqué auprès de Mataji que par eux-mêmes, ils le lui confièrent, au printemps 1990. Inquiets du sort réservé à leur petit-fils, ce sont les grand-parents de Yoann qui, un an plus tard, lancèrent l’alarme et saisirent la justice et la DDASS.

L’affaire Yoann est ici exemplaire à double titre : d’une part, elle met lumière le rôle capital que peuvent et doivent jouer les grands-parents dans de tels cas ; d’autre part, elle souligne l’importance déterminante de la Convention internationale des droits de l’enfant sur laquelle s’est appuyé l’avocat des grands-parents, Maître Patrick Bocquet.

Une mesure de protection judiciaire ayant été décidée par le juge des enfants, l’inculpation des parents prononcée par le juge d’instruction « pour manque de direction nécessaire à l’enfant, compromettant gravement sa santé, sa sécurité et sa moralité », la secte décida de renvoyer l’enfant en France (26 mai 1991).

Par un jugement rendu le 23 septembre 1991, le juge des enfants de Rennes ordonna le maintien de Yoann et de sa soeur Karina, âgée de quinze mois, sous l’autorité de leurs parents en imposant leur résidence au domicile familial et confirma la mesure d’assistance éducative prononcée le 11 juin au bénéfice des deux enfants.