Un père dont le fils est scolarisé dans une école Steiner, témoigne pour le journal Taz des réticences des enseignants de l’école et des autres parents à appliquer les mesures barrières. Craignant des représailles sur son fils, il a choisi de modifier son identité pour témoigner.
Jens Husch a scolarisé son fils en école Steiner un peu par hasard, mais comme tout allait bien jusqu’à l’arrivée de la Covid 19, il ne s’est pas posé de questions. En revanche, ses critiques quant au manque de respect des règles d’hygiène ont été considérées comme un affront par le personnel de l’école. Pour eux « la pédagogie a la priorité sur tout », même sur toute mesure barrière.
Jens Hush a commencé à douter de l’école lorsqu’à la fin des vacances d’été. Un appel a été lancé par les parents d’élèves pour demander un boycott des masques. Ils étaient soutenus par l’école qui a envoyé des dizaines de mails à ce sujet. Selon le procès-verbal d’une réunion qui s’est tenue en octobre, le responsable de l’hygiène s’inquiète que les mesures sanitaires soient un obstacle à la mise en place de l’éducation Waldorf.
Si chacune des 250 écoles Waldorf allemande est gérée indépendamment, elles ont cependant en commun de prôner une « éducation pour la liberté » qui se voit actuellement contrariée par les restrictions mises en place par l’Etat pour contrer l’épidémie. Plusieurs journaux allemands se sont fait l’écho de la participation d’anthroposophes aux manifestations anti-masques aux côtés de l’extrême droite. Selon Michael Blume1, commissaire à l’antisémitisme du Bade-Wurtemberg et spécialiste de l’Anthroposophie, leur contestation n’est pas surprenante, car « Les anthroposophes ont tendance à critiquer l’autorité, et beaucoup sont sceptiques à l’égard de la médecine orthodoxe ».
Depuis le début de la pandémie, ils ont été plusieurs à s’opposer au gouvernement en avançant souvent des arguments complotistes. Christophe Huek, qui forme des
enseignants Waldorf, répand l’idée selon laquelle un bon système immunitaire est suffisant contre le virus, tandis que Thomas Brunner, un professeur Waldorf, dénonce dans un mail envoyé aux parents « la folie des manipulations politiques mondiales par le lobby pharmaceutique » et « l’action délibérée et brutale pour soumettre et exploiter l’humanité entière ». Récemment, un quart des enseignants de l’école Waldorf de Müllheim s’est soustrait au port du masque et a fait pression sur un élève qui avait prévenu la police en l’accusant de « trahison et abus de confiance » et en le menaçant d’expulsion.
Officiellement, la Fédération des écoles Waldorf indépendantes (BdFWS) affirme lutter contre les conspirations « absurdes » et prétend que la majorité des parents et des enseignants respecteraient les mesures gouvernementales. Cependant, les journalistes de Taz ont relevé dans Erziehungskunst, la revue des écoles Waldorf en Allemagne, des écrits qui contredisent ces affirmations. Dans le numéro d’octobre 2020, son rédacteur en chef, Mathias Maurer, a comparé les masques à des burkas. En mars 2020 Wolfgang Wodarg, un médecin controversé, avait écrit un article dans lequel il minimisait la pandémie. Kullak-Ublick, porte-parole de la BdFWS, reconnaît que plusieurs personnes proches de Waldorf sont
intervenues dans le débat avec « des déclarations de droite radicale, de conspiration pure et dure, de nature mythique et parfois extrêmement agressives ».
(Source : Taz.de, 04.12.2020)
1. Il a récemment été invité par la Société Anthroposophique pour donner des conseils visant à faire oublier les écrits antisémites de Rudolf Steiner qui ternissent son image.