Et si le gourou était lui-même manipulé ?

Les Reclus de Monflanquin

A l’automne 2001, onze membres de la famille Védrines s’étaient coupés du monde sous l’emprise mentale d’un « gourou », Thierry Tilly. Reclus pendant huit ans, d’abord à Monflanquin puis à Oxford en Angleterre, ils avaient aussi été dépouillés de tous leurs biens.


Les enquêteurs du Service régional de police judiciaire (SRPJ) de Toulouse, assistés de l’Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP) poursuivent leurs investigations « dans le cadre de la commission rogatoire délivrée par le juge d’instruction bordelais Stéphane Lozentz ». A noter que ce dernier, « promu dans quelques jours au tribunal de grande instance de Saint-Nazaire », n’a pas encore de successeur désigné « dans ce dossier d’une grande complexité ».
Le dernier acte du juge bordelais aura été la mise en liberté pour raisons médicales, fin juillet 2010, de Jacques Gonzalez, 63 ans, présenté maintenant comme le « donneur d’ordre » de Thierry Tilly.

Rappelons que Thierry Tilly, 46 ans, a été interpellé en Suisse le 21 octobre 2009 sur mandat d’arrêt européen puis mis en examen pour « séquestration avec actes de torture et de barbarie, escroquerie, extorsion de fonds et abus de faiblesse » au préjudice de la famille de Védrines. 4 millions d’euros auraient ainsi été détournés. Aujourd’hui, Thierry Tilly, en détention provisoire, « se dit victime d’une machination » mais refuse l’assistance d’un avocat.

Au départ, Thierry Tilly a prétexté occuper les fonctions de fondé de pouvoir d’une association humanitaire, The Blue Light Foundation, implantée au Canada et présidée par… Jacques Gonzalez. Les Védrines avaient alors répondu à des sollicitations financières de Thierry Tilly et s’étaient montrés généreux envers l’association. Sauf que l’argent n’a jamais été versé sur les comptes de The Blue Light Foundation qui « n’a jamais eu d’activité ». Son compte bancaire a d’ailleurs été fermé « en
raison du défaut de transaction ».

Quant à Jacques Gonzalez, domicilié à Paris, il « ne travaille plus depuis 1992 et ne déclare aucun revenu ». Il reconnaît, « semble-t-il », avoir utilisé une partie des fonds provenant de la famille de Védrines. Son « homme de confiance », Pascal Boucheteau, « dit le Grand Pascal » a alors servi d’intermédiaire «à maintes reprises » pour transporter des sacs contenant de l’argent. Jacques Gonzalez apparaîtrait effectivement, « au fil de l’information judiciaire » comme « le donneur d’ordres » de Thierry Tilly. Il aurait été « destinataire de sommes prélevées sur les comptes de la Citybank en Belgique » et aurait bénéficié « de remises indirectes via un compte off-shore » après la vente de terrains appartenant à la famille de Védrines. Après son arrestation en juin 2010, les policiers anglais ont découvert 35.000 euros dans un coffre qu’il louait auprès de la société Parlane, à Londres, mais aussi des comptes en Suisse et en Belgique, ainsi que des objets de très grande valeur… Le sexagénaire parisien a été mis en examen « pour blanchiment, organisation frauduleuse d’insolvabilité, abus de confiance,
escroqueries, séquestration avec actes de torture et de barbarie, abus de faiblesse, extorsion de fonds, complicité, recel habituel et non-justification de ressources ». Remis en liberté, il est maintenant assigné à résidence sous bracelet électronique.

La question qui se pose dorénavant est de savoir si Thierry Tilly a lui-même été manipulé par Jacques Gonzalez… Toujours est-il qu’ils ont tous deux créé « une véritable nébuleuse de comptes à l’étranger ».
Rappelons enfin « qu’à ce stade de la procédure », ils bénéficient de « la présomption d’innocence ».

Source : www.sudouest, Jean-Michel Desplos, 28.07.2010 & 26.08.2010