Affaire Arcadia : quatre membres renvoyés devant le tribunal judiciaire

Arcadia, une PME florissante installée dans les Yvelines, aurait été pillée de l’intérieur par des adeptes de l’Église de Scientologie. Le dossier, renvoyé devant le tribunal correctionnel de Versailles, fait état de harcèlement, souffrances psychiques et faillite sur fond de dérives sectaires.

L’Église de Scientologie, plutôt discrète ces derniers temps dans les prétoires français, revient au cœur d’une affaire judiciaire retentissante. Quatre de ses membres, dont une figure emblématique du mouvement en France, seront jugés devant le tribunal judiciaire de Versailles pour harcèlement moral, abus de biens sociaux et recel de banqueroute. Au centre du dossier : Arcadia, une PME du bâtiment des Yvelines, vidée de sa substance et gangrenée par des méthodes managériales inspirées de la doctrine scientologue.

L’affaire débute en 2014, après la plainte de douze salariés de l’entreprise, alors dirigée par Frédéric Langlois. Ce dernier, fragilisé par une tragédie familiale, s’était rapproché du mouvement dans les années 2000. Progressivement, des scientologues se seraient infiltrés dans Arcadia, transformant ses pratiques internes et son management.

Sous l’influence de Cyrille Pincanon, auditeur et adepte du Celebrity Centre, Arcadia aurait adopté des méthodes dérivées des préceptes de Ron Hubbard. Communication aseptisée, surveillance généralisée, exercice de confrontation… Un climat de peur s’installe. Les récalcitrants sont stigmatisés comme des « esprits noirs », exclus ou poussés à bout. Un expert judiciaire souligne des conséquences lourdes sur la santé mentale et familiale des salariés.

En parallèle, les finances de l’entreprise sont siphonnées. Cyrille Pincanon facture près de 700 000 € à Arcadia via sa société et reverse plus de 500 000 € à l’Église de Scientologie, obtenant le titre de « Silver Meritorious ». Un autre membre, Pascal Maffre, propulsé directeur financier, valide des virements douteux, dont 44 000 € transférés sur le compte de Cyrille Pincanon alors que Arcadia est en cessation de paiements.

Dérives sectaires et crise familiale

Une troisième figure, Eric Ianna, pilier de l’Église de Scientologie en France, aurait joué un rôle d’idéologue. C’est lui qui a formé certains employés via sa société, leur inculquant des classifications ésotériques de clients (« lumineux » ou « sombres ») et des tests psychologiques scientologues.

Frédéric Langlois, toujours membre du mouvement, a fini par reconnaître avoir été manipulé. Pris dans la tourmente, il a perdu sa maison, sa société et est en rupture avec son fils, parti fonder une entreprise concurrente. Le conflit familial fait désormais l’objet d’une autre procédure pour concurrence déloyale.

Les prévenus contestent les faits et dénoncent « une cabale liée à leur appartenance religieuse ». Mais l’affaire Arcadia relance le débat sur l’emprise de l’Église de Scientologie dans la sphère économique. Le procès arrive alors que l’organisation tentait de redorer son blason, avec l’ouverture en grande pompe d’un centre à Saint-Denis, en marge des JO de Paris, notamment. Aucun des avocats concernés par cette affaire n’a souhaité donner suite aux sollicitations des journalistes. 

(Source : Libération, 23.06.2025)

A lire aussi sur le site de l’Unadfi : L’ensemble des articles concernant l’affaire Arcadia : https://www.unadfi.org/?s=arcadia

  • Auteur : Unadfi