Le recours à un coach demande une particulière vigilance. Cette « discipline » pour laquelle il n’existe aucune définition ni aucune formation officielle rencontre pourtant un succès irrationnel dans toutes les sphères, et souvent les plus hautes, de la société. Les mesures engagées pour encadrer cette pratique sont loin d’être satisfaisantes au regard du danger que peut représenter un coach mal intentionné, incompétent ou peu soucieux de déontologie.
Les coachs au nombre de 4 600 auraient par leurs activités généré 1,1 milliard d’euros pour l’année 2015. Le marché des particuliers ne faisant l’objet d’aucune estimation, ces chiffres ne valent que pour le coaching en entreprise. Une séance serait facturée 500 euros de l’heure en moyenne, 2 500 euros par jour pour les séances de groupe.
David Laroche, jeune français de 29 ans, « formé sur le tas », s’est forgé une solide réputation sur les réseaux sociaux. Il propose séminaires et stages aux entreprises et aux particuliers, en France et à l’étranger. La Miviludes a reçu un signalement concernant une jeune femme littéralement happée par ce coach « star ». Un de ses proches a raconté qu’elle avait dépensé près de 20 000 euros sans compter les frais de déplacement et d’hébergement et comment elle s’est progressivement désinvestie dans sa vie professionnelle et personnelle et éloignée de ses repères. « Lorsqu’elle n’était pas en stage, elle passait son temps sur les réseaux sociaux avec les autres participants » a-t-il raconté. « Ce cercle très fermé, l’a peu à peu coupé de ses proches. Elle était en quête d’authenticité, moi j’ai l’impression qu’on est en train de la conditionner » a-t-il poursuivi.
En cinq ans, la Miviludes a recensés 27 signalements concernant David Laroche. Plus largement, le coaching représente 10 à 20% des signalements enregistrés par la Mission. Serge Blisko, son président, s’inquiète car « derrière ce mot se cachent beaucoup de personnes qui ne sont pas très sérieuses ni très bienveillantes ».
Certains profitent du flou qui entoure la profession pour proposer des méthodes contestées. Ainsi la Sécurité Sociale a engagé un coach « Elément humain » censé résoudre les problèmes de mal-être et de suicide dans les entreprises. Cette méthode développée par le psychologue américain Will Schutz a été détournée, à sa mort, par son fils qui en a fait un véritable business.
Ainsi, Georges a vu sa femme s’éloigner jusqu’à demander le divorce après avoir suivi cette formation. Entre-temps elle était elle-même devenue coach « Elément humain » hors cadre de son entreprise. Serge Blisko conseille de se méfier de « toute sollicitation d’un coach en dehors du cadre de l’entreprise ».
Jean-François Amadieu, sociologue spécialiste des relations au travail, estime que les pratiques des coachs reposent sur « quelque chose de nébuleux ». « Il n’y a pas de formation publique, on ne vérifie pas les compétences des gens » poursuit-il.
Les sectes peuvent également profiter de ce flou pour infiltrer les entreprises. La Scientologie s’est ainsi introduite dans une entreprise de Voisins-le-Bretonneux (Yvelines). Son patron, devenu scientologue, a laissé le champ libre à trois coachs de l’organisation. Le premier a été chargé des finances, le deuxième de l’aspect commercial et le troisième du management. Ce dernier a cherché à imposer aux salariés de l’entreprise des lectures de Ron Hubbard (fondateur de la Scientologie) et des exercices liés à la Dianétique (méthode de la Scientologie). Il leur a également expressément imposé de ne plus communiquer que par écrit. Leur organigramme a été modifié pour devenir l’exacte réplique de celui de la Scientologie.
Le parquet de Versailles a ouvert une information judiciaire visant la Scientologie pour harcèlement moral, abus de faiblesse, abus de biens sociaux, banqueroute et recel suite à la plainte de douze salariés en juin 2014.
Depuis 2017, tout coach souhaitant être éligible aux fonds de financement de la formation doit être référencé sur Datadock, base de données censée garantir un « contrôle qualité ». Pourtant, Jean-François Amadieu constate que les indicateurs n’évaluent que la part administrative de la formation et non les contenus.
Concernant les certifications émises par les associations de coaching, le sociologue rappelle qu’il « ne s’agit pas d’une discipline académique. Il s’agit là de professionnels qui se délivrent des labels entre eux. Tout cela n’offre strictement aucune garantie ».
Du côté des pouvoirs publics, aucun projet de réglementation de la profession n’est à l’ordre du jour.
(Sources : AFP et Le Parisien, 16.09.2015 & France Inter, 17.11.2018)