Le mercredi 10 octobre 2012 s’est tenue la réunion constitutive de la commission d’enquête sur l’influence des mouvements à caractère sectaire dans le domaine de la santé. La commission qui comporte 21 membres et dont le rapporteur est Jacques Mézard, est présidée par Alain Milon. Les premières auditions ont eu lieu le 24 octobre 2012. La commission rendra son rapport en avril 2013.
S’appuyant sur les conclusions du rapport de la Miviludes, Jacques Mézard souligne que « le développement de pratiques non conventionnelles à visée thérapeutique sans fondement scientifique ou encore de prises en charge psychologiques hors du cadre psychothérapeutique pose aujourd’hui une réelle question de santé publique encore mal connue, qu’il importe d’évaluer. Au-delà du risque pour la santé, toutes ces pratiques ne sont pas sectaires, mais elles sont une véritable porte d’entrée pour les mouvements sectaires ».
Lors de son audition, le président de la Miviludes, Serge Blisko a fourni un échantillon de quelques-unes des 400 pratiques non conventionnelles à visée thérapeutique qui existent sur le marché. Il a rapporté que quelque 1.800 structures d’enseignement ou de formations à risques existent dans ce domaine. Quant à l’infiltration sectaire, elle peut s’exercer par le biais de médecins « déviants » estimés à environ 3.000, par l’introduction « de méthodes à risque » au sein de l’hôpital, par le biais de la formation des personnels paramédicaux et par des actions de lobbying ou de prosélytisme. Rappelant les actions entreprises par la Mission, notamment la publication du guide « Santé et dérives sectaires » ainsi que la campagne de sensibilisation des patients atteints de cancer, Serge Blisko a effectué un rapide bilan : en 2012, la Miviludes a recensé 12 plaintes auprès du procureur, 42 transmissions aux Agences régionales de santé (ARS) dans le but de les sensibiliser, 60 signalements à l’Ordre des Médecins et 14 saisines des directions régionales de la répression des fraudes.
« Notre législation est forte mais elle est mise en défaut par des béances où s’engouffrent les charlatans » a déclaré Serge Blisko. Il a déploré que les ARS ne soient pas suffisamment à l’écoute, rappelant que depuis 2010, la loi prévoit la désignation d’un « référent dérives sectaires » dans chaque agence. Or, la Miviludes n’a jamais eu la liste de ces référents… Il a également regretté « la mauvaise articulation entre les agences et les délégations départementales ». De son côté, Hervé Machi, secrétaire général de la Miviludes, a demandé « l’extension du pouvoir des ARS » afin qu’elles puissent contrôler les « dérapeuthes » qui exercent librement en raison « d’un vide juridique aberrant ».
Par ailleurs, le président de la Miviludes a suggéré que l’interdiction d’exercer pour les médecins soit également valable à l’étranger pour éviter que les professionnels visés ne s’installent pas à 20 km de la frontière, et il a regretté que les médecins radiés conservent leur titre de docteur.
En ce qui concerne les formations diplômantes, la Mission propose de protéger les titres « université » et « institut » ainsi que de renforcer le pouvoir des rectorats. Elle demande également un contrôle plus important des centres de bien-être, « porte d’entrée » à la prolifération des méthodes charlatanesques.
Enfin, la Mission encourage les services fiscaux à se pencher sur ce marché de plusieurs dizaines de millions d’euros pour lequel les transactions se réalisent le plus souvent en « liquide ».
Source : Sénat, 17.10.2012 & Le Nouvel Observateur / Sipa & Le Bien Public & Le Quotidien du Médecin, Patrice Barrère, 25.10.2012