Jugement : Association spirituelle de l’Eglise de Scientologie / UNADFI

Suite à une assignation de l’Association Spirituelle de l’Église de Scientologie Celebrity Centre, le Tribunal de Grande Instance de Caen a rendu son jugement le 10 septembre 2012.


Le 13 août 2010, l’Association spirituelle de l’Église de Scientologie Celebrity Centre (ASES-CC), situé 69 rue Legendre à 75017 Paris, a fait assigner, devant le Tribunal de Grande Instance de Caen, l’Union Nationale des Associations de défense des Familles et de l’Individu (UNADFI) en tant qu’éditeur du site internet www.unadfi.org.

Le 28 mai 2010, l’UNADFI avait publié sur son site internet un article sur le documentaire intitulé : « Scientologie : la vérité sur un mensonge », diffusé sur la chaîne de télévision France 2 le 27 mai 2010.

L’ASES-CC soutenant que certains passages de ce document ont porté atteinte à sa présomption d’innocence, a donc fait délivrer à l’UNADFI une assignation, le 13 août 2010, soit dans les trois mois du jour de l’acte de publication.

Postérieurement, les significations successives des écritures de chaque partie, ainsi que l’ordonnance de clôture du 21 mars 2012, ont valablement interrompu ce délai de prescription. L’ASES-CC a fait valoir que si elle a bien été condamnée le 27 octobre 2009 par la 12ème Chambre du Tribunal Correctionnel de Paris pour escroquerie en bande organisée, « cet article ne mentionne pas le caractère non définitif de cette condamnation, ce qui constitue une atteinte à la présomption d’innocence ». Pour la Scientologie, l’évocation d’une décision de condamnation en réalité frappée d’appel constitue en soi une atteinte à la présomption d’innocence.

Le jugement reprend intégralement l’article publié par l’UNADFI sur son site internet le 28 mai 2010. Il apparaît que l’article en question cite dès le début les auteurs du reportage télévisé, mettant leurs propos entre guillemets. L’UNADFI a indiqué « leur manière de mener leurs investigations journalistiques par la confrontation des éléments à charge et à décharge sur l’Église de Scientologie ». L’UNADFI a également utilisé, outre les guillemets, la précaution de style « Selon les auteurs », ainsi que le mode italique, pour retranscrire, à la fin de l’article, un extrait des paroles des auteurs du reportage.
Il est écrit dans le jugement que » cet article litigieux qui ne révèle aucun préjugé sur la culpabilité de l’Église de Scientologie et ne comporte pas une déclaration définitive de culpabilité, demeure une présentation du contenu d’un documentaire diffusé à la télévision ». Aucun passage « n’exprime un jugement personnel ou une déclaration ouverte de culpabilité à l’encontre de l’Église de Scientologie de la part de l’UNADFI, qui n’a pas agi abusivement ».

Seule une condamnation irrévocable fait disparaître relativement aux faits qu’elle sanctionne la présomption d’innocence dont l’article 9-1 assure le respect. Mais au regard de l’article 41 de la loi de 1881, « il n’est pas interdit de publier un jugement de condamnation non définitif, s’agissant d’un acte lu en audience publique ».

L’article publié par l’UNADFI fait référence à un évènement judiciaire, datant de sept mois, mais dont l’existence et la primauté (« pour la première fois ») ne sont ni contestées, ni contestables, et sans que soit exprimé un sentiment personnel, une conviction ou un parti pris sur la culpabilité de l’Église de Scientologie ». Le fait de ne pas avoir précisé que cette condamnation n’était pas définitive « ne manifeste pas en lui-même un préjugé sur la culpabilité et, en toute hypothèse, il appartient à la demanderesse d’établir que cette omission résulte d’une intention de nuire de l’UNADFI constitutive d’une faute, ce qu’elle ne fait pas en l’espèce, procédant par de simples affirmations ».

En conclusion, le jugement spécifie qu’au vu de l’ensemble de ces éléments, l’article publié par l’UNADFI ne porte pas atteinte à la présomption d’innocence de l’Église de Scientologie.

Le Tribunal statuant publiquement par jugement contradictoire et en premier ressort, déboute l’Association de l’Église de Scientologie Celebrity Centre de toutes ses demandes. Il la condamne à payer à l’Union nationale des Associations de défense des Familles et de l’Individu la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Maître Marc François, avocat de l’UNADFI souligne qu’ «il s’agit d’une décision particulièrement satisfaisante : le Tribunal de Caen a eu le courage d’aller sur le fond du dossier et de trancher. Il fallait mettre un coup d’arrêt à cette procédure sous-tendue par la volonté de l’ASES-CC de poursuivre systématiquement l’UNADFI, fusse dans le cadre d’une simple information donnée bien légitimement au public.
Le droit d’informer et d’être informé contre les dérives sectaires est ici protégé et c’est évidemment une bonne nouvelle.»

[A ce jour, l’UNADFI n’a pas connaissance que l’ASES-CC ait fait appel de ce jugement du 10 septembre 2012.]

 

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