Gourous existentiels : un métier ! 

Conjuguer un discours centré sur l’humain et être en phase avec les aspirations de la société pour mieux influencer, manipuler et ruiner : c’est la recette des « gourous existentiels ». 

Dans un contexte marqué par les bouleversements sanitaires, économiques et technologiques, les figures traditionnelles de pouvoir cèdent la place à une nouvelle génération de leaders : les « gourous existentiels ». Inspirés par les travaux de Sai Bhargavi Vedula sur le « leadership existentiel », ces maîtres modernes savent capter les angoisses contemporaines pour mieux y répondre par des solutions simples, séduisantes… Et lucratives.

Fini les méthodes coercitives, l’heure est à la bienveillance feinte, au développement personnel guidé, à la soumission consentie. Le nouveau gourou ne contraint plus, il accompagne. Il ne promet pas le paradis, il vend une réincarnation intérieure, tarifée à l’heure.

Quatre leviers

Pour asseoir son autorité, il dispose de quatre leviers existentiels.

– La mort, ou comment transformer l’angoisse du vide en moteur de croissance spirituelle.

– La liberté, redéfinie comme un cadre balisé menant au « lâcher-prise »… Sous contrôle.

– Le sentiment d’appartenance, toujours efficace quand il s’agit d’isoler et de fédérer.

– L’authenticité, une injonction à être soi… Dans les limites dictées par le gourou.

Dans ce monde devenu VICA (Volatile, Incertain, Complexe, Ambigu), le rôle du guide est de maintenir un climat d’alerte permanente, tout en prodiguant des « clés de libération », autrement dit des formations hors de prix, un coaching ésotérique ou des soins énergétiques aux noms inventifs mais évocateurs.

Car derrière le vernis spirituel, l’enjeu reste profondément matériel. Le gourou d’aujourd’hui, conscient que « donner du sens » ne suffit plus, s’assure aussi une sécurité financière confortable. Il monétise la quête de sens via des objectifs flous et infinis : « croissance holistique », « reconnexion au moi profond », ou « élévation de la conscience ». Ajoutez une touche thérapeutique comme le « nettoyage des chakras », la « libération karmique » ou le « rééquilibrage quantique » et vous obtenez un modèle économique robuste, aussi durable qu’un burn-out bien entretenu.

Ultime leçon venue de la nature : le gourou est comme un parasite avisé, il sait que pour prospérer, son hôte doit rester vivant… Et solvable. 

(Source : Le Point, 20.05.2025)

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  • Auteur : Unadfi