Suite au suicide d’une ancienne adepte de la Scientologie, ses deux enfants et son ex-mari portent plainte contre l’organisation fondée par Ron Hubbard. Malgré des conclusions accablantes de la police judiciaire, le juge d’instruction envisage de décerner un non-lieu. L’avocat des parties civiles dénonce « l’impunité de fait » de la Scientologie qui de son côté estime ne pas être concernée par ce « drame familial ».
Gloria Lopez, 47 ans, divorcée, mère de deux enfants, se suicide en décembre 2006. Sa famille affirme que son geste est liée à l’emprise de la Scientologie dont elle est membre et aux dommages financiers qui en découlent. Les dépenses réalisées depuis son entrée dans la Scientologie l’ont contrainte à vendre des biens immobiliers. Ses enfants avaient noté un changement dans son comportement surtout depuis qu’elle était rentrée d’un séjour à la Sea Org au Danemark.
La famille dépose plainte en 2011 pour abus de faiblesse et escroquerie en bande organisée.
Me Rodolphe Bosselut, avocat des enfants de Gloria Lopez ainsi que de son ex-mari, pense que le dossier est suffisamment solide : « C’est un dossier exceptionnel car nous disposons d’écrits personnels et intimes de Mme Gloria Lopez, contemporains du suicide qui expliquent les raisons profondes de son désarroi, à savoir les dépenses faramineuses qui lui ont été imposées par la Scientologie la contraignant à changer de vie et à déprimer ! »
Les conclusions du rapport de l’Office central pour la Répression des Violences aux Personnes (OCRVP), daté du 24 février 2010, sont également accablantes pour la Scientologie. Elles confirment que Gloria Lopez a suivi ses cours, qu’elle s’est rendue au Danemark, qu’elle a réglé, entre 1999 et 2006, la somme rondelette de 131.067 euros aux diverses organisations de la Scientologie. L’ensemble des investigations menées « permet d’établir qu’en 2000, Gloria Lopez a rompu avec sa famille et ses amis, perdu la garde de ses enfants, vendu sa maison et quitté son travail dans le seul but de s’installer au plus près du Celebrity Center de Paris [centre de la Scientologie]. Elle (…) s’est endettée pour payer les dépenses courantes ainsi qu’un appartement.(…) L’enquête démontre également que la Scientologie fonctionne en vase clos et substitue des valeurs inventées au cadre de référence classique. En outre, elle utilise des méthodes commerciales très organisées, oppressantes et agressives visant à assurer de forts bénéficies à ses responsables. »
Pourtant, le 15 juin 2011, le Parquet de Nanterre classe l’affaire sans suite. Il estime que Gloria Lopez n’a pas été en état de sujétion psychologique.
Me Bosselut n’est pas d’accord. Selon lui, « il existe des éléments accréditant la thèse de l’abus de faiblesse et de la mise en danger de la vie d’autrui ». Alors, pour éviter que cette affaire ne soit enterrée, il dépose plainte avec constitution de partie civile. Il souhaite faire témoigner trois adeptes de la Scientologie proches de Gloria Lopez. Il demande également une perquisition du Celebrity Center afin de récupérer les documents comptables attestant des dépenses de Gloria Lopez. Mais les résultats sont décevants : les trois témoins ont disparus et la perquisition n’a rien donné.
Un juge d’instruction est désigné mais la victoire sera de courte durée : le magistrat estime toujours qu’il n’y a pas lieu à poursuivre l’Église de Scientologie. Il envisage de rendre un non-lieu.
Me Bosselut fulmine « contre une impunité de fait découlant de la multiplication, au sein de l’Église de Scientologie, de structures censées être indépendantes mais qui se renvoient la balle, et d’adeptes qui ont tous, opportunément, perdu la mémoire ! ». Mais l’avocat promet qu’il ne lâchera rien.
(Source : Atlantico, 26.02.2015)