Sectes et santé

L’attrait de nos contemporains pour les soins qualifiés par les uns d’ « alternatifs » et par d’autres de « parallèles » alors que la médecine ne cesse de réaliser des progrès. Les approches de la maladie, du soin et de la guérison font partie des thèmes dominant les discours et la pratique de groupes à dérives sectaires. L’attrait pour ces techniques, non éprouvées pour la plupart d’entre elles, est devenu un véritable phénomène de mode.


Il est vrai que la notion de santé a beaucoup évolué au cours de ces dernières années. Cette évolution donne une place de plus en plus importante aux prestations visant au développement de la personne, de son bien-être, de son épanouissement. La « bonne santé » n’est plus seulement déterminée par l’absence de maladie mais plutôt par « un état total de bien-être physique, social et mental de la personne ». Il ne s’agit plus uniquement de guérir les maladies mais aussi de les empêcher de survenir.

Des groupes ou individus dont la motivation est le plus souvent purement mercantile, s’appliquent à exercer leur emprise sur un public particulièrement vulnérable. Leur discours, souvent habillé d’un vocabulaire pseudo-scientifique, s’adresse en priorité aux personnes souffrant de maladies graves. Mais ils s’adressent aussi à tous ceux qui voudraient tout simplement être mieux dans leur peau et obtenir plus de performances dans leur vie. Afin de s’octroyer l’espace nécessaire à leur activité, ces « charlatans » contestent à la médecine le monopole de la santé pour proposer des pratiques alimentées par des critères tout autre que la valeur scientifique et l’efficacité.

Les victimes sont celles de mouvements sectaires caractérisés mais aussi de guérisseurs, d’escrocs et de charlatans et parfois de médecins et de paramédicaux pratiquant des soins dits « alternatifs » ou « parallèles » qu’il s’agisse de maux de nature somatique ou psychologique. Confronté à des sujets tels que la souffrance, la peur de la mort, l’inquiétude pour un proche, l’individu porte des interrogations pour lesquelles la science médicale admet, de façon provisoire, ses limites. Influencé par sa culture, ses origines sociales et son rapport à la spiritualité, il développe sa propre interprétation des évènements douloureux qui surviennent dans son existence. C’est dans le nombre infini de ces interprétations et dans la vulnérabilité de la personne « objet » de soin, que les escrocs de la santé puisent leurs ressources. Ne s’embarrassant ni de loyauté, ni de respect de la personne humaine, ils rentrent dans la logique économique de la loi de l’offre et de la demande.

Le propos n’est pas ici de remettre en question la liberté de croire en telle ou telle théorie ou de pratiquer telle ou telle méthode thérapeutique. Il est plutôt de faire appel à l’esprit critique de celles et ceux qui hésiteraient à utiliser l’une d’elle. Ne serait-ce que par le questionnement. Peut-on guérir d’une leucémie uniquement par un travail psychologique ? Peut-on échapper réellement à la maladie en se nourrissant uniquement d’air et de lumière ? Peut-on vaincre une sclérose en plaque par une « déprogrammation biologique » ou par la simple imposition des mains ?

A considérer la publicité qui en est faite, le marché de ces médecines non conventionnelles à visée thérapeutique et du bien-être semble pourtant afficher une remarquable santé. Si l’on ne peut contester que certaines soient anodines, elles deviennent dangereuses si elles prétendent être une alternative exclusive à la médecine éprouvée scientifiquement et se substituer à elle dans les cas d’affections graves tel le cancer. Ces revendications sont d’autant plus préoccupantes si l’on estime que 30 à 50% de la population font régulièrement appel à ces méthodes. Dans une perspective de prévention, il paraît plus approprié, plutôt que d’essayer de définir si une technique s’avère efficace ou pas, de considérer si la méthode utilisée représente un danger.