Prenez-en de la graine

Conspiracy Watch réagit à l’enquête d’Elise Lucet « Multinationales : hold-up sur nos fruits et légumes » dans laquelle une séquence de deux minutes « met à l’honneur » Kokopelli, association militant pour la vente libre de semences bio et reproductibles. Spécialisé dans la dénonciation de théories complotistes, Conspiracy Watch a souhaité apporter des informations éludées dans le reportage sur cette petite « entreprise ».


Pour Conspiracy Watch, « Tout se passe comme si les journalistes de Cash Investigation avaient choisi d’ignorer totalement une masse de documents, accessibles en quelques clics. »

Kokopelli est une « association familiale » créée en 1999 par Dominique Guillet et son épouse Sofy. dont son fils, Ananda Guillet, a pris les rênes l’année dernière. Elle s’oppose à toute réglementation sur les semences et à l’industrie pharmaceutique.
Dominique Guillet aurait quitté la présidence pour pouvoir s’exprimer librement. Il utilise pour ce faire le diminutif « Xochi » (« son prénom de guerrier Gaïen ») et s’exprime sur son blog personnel, Xochipelli, sous-titré « Libération des Neurognostiques Sérotoninergiques de la Biosphère Gaïenne ».

La controverse débute avec la parution en mars 2017 d’un livre, « Nous n’irons plus pointer chez Gaïa. Jours de travail à Kokopelli », signé de militants anarchistes déçus qui racontent leur expérience de travail dans et avec Kokopelli. Ce livre collectif fait la critique des pratiques managériales et commerciales de l’association, et entend dévoiler une face cachée de cette structure qui, selon lui, s’avère être d’abord un acteur économique surfant sur la vague du capitalisme vert. Kokopelli, dont le chiffre d’affaire annuel atteint tout de même aujourd’hui plusieurs millions d’euros, a ouvert des antennes en Europe, en Amérique du Sud et en Inde.

Puis, il y a la parution d’un article de Daniel Vivas, Nous n’irons plus acheter nos graines chez Kokopelli, retiré de la publication après que Kokopelli ait engagé des poursuites judiciaires contre l’auteur. Le 13 octobre 2017, le Tribunal de Grande Instance de Paris reconnaît la bonne foi et le sérieux des affirmations du blogueur et déboute Kokopelli de toutes ses demandes.

Géraldine Woessner, journaliste à Europe 1, a également fortement réagi : « Dieu qu’elle est sympathique, cette association #Kokopelli dont le service public fait la promotion ! Conspirationiste, climatosceptique, furieusement anti-vaccins… Un petit tour sur les écrits délirants de son fondateur donne proprement le vertige ».

Géraldine Woessner se réfère à des positions de Dominique Guillet quelque peu en dissonance avec le portrait élogieux d’Elise Lucet. Elle reprend par exemple un texte, publié en décembre 2018 sur son blog sous le titre « Au Festival des Quenelles de l’Humour : Macron dégage !!! », dans lequel il fait l’éloge de Dieudonné M’bala-M’bala mais fustige les juifs et la vaccination.

La même année, Médiapart avait recensé les nombreuses critiques à l’encontre des pratiques de Kokopelli. On y apprend par exemple que Dominique Guillet avait commencé sa carrière dans le business des Fleurs de Bach. Ou encore que, poursuivi en 2005 pour « commercialisation de semences de variétés non homologuées et dans des sachets ne comportant pas un étiquetage conforme », il a été condamné en appel à 17 000 euros d’amende. Grâce à un ministre du gouvernement Sarkozy, l’Etat renoncera à percevoir l’amende. Ce procès et d’autres (entre 2005 et 2014) lui auront paradoxalement valu son succès.

En juin 2018, Kokopelli s’était également fait remarquer en invitant Henri Joyeux, professeur anti-IVG et anti-vaccination, comme conférencier sur « l’alimentation biologique ».

(Sources: Mediapart, 04.01.2019 & Conspiracy Watch, 27.06.2019 & Wikipedia)