Figure tutélaire des milieux conspirationnistes, Donald Trump se retrouve aujourd’hui pris au piège d’un système de pensée qu’il a lui-même contribué à renforcer. Désigné à son tour comme acteur d’un prétendu complot, l’ex-président américain fait face à un retournement inédit, analysé par Julien Giry, politologue spécialisé dans le complotisme.
Les théories du complot n’épargnent désormais plus leurs propres héros. Si Trump continue de bénéficier du soutien massif de sa base « MAGA », une frange plus radicale des milieux conspirationnistes commence à le suspecter d’être lui-même un agent du « deep state » qu’il prétendait combattre. Ce phénomène, bien que spectaculaire, n’est pas nouveau. En 2020 déjà, des adeptes de QAnon s’interrogeaient sur l’authenticité de leur idole.
Pour Julien Giry, ces dynamiques internes sont fréquentes dans les sphères complotistes. « Les différentes chapelles s’accusent souvent mutuellement d’être des infiltrés ou des traîtres pour conserver leur légitimité ». Une logique de suspicion permanente qui peut aboutir à de véritables purges idéologiques.
Mais Trump est-il en danger ? « Pas immédiatement », selon le chercheur. La majorité de ses partisans restent fidèles, même si certains sont désorientés. À moyen terme, « l’accumulation de contradictions pourrait toutefois éroder ce socle » estime l’expert. Car dans l’univers conspirationniste, les faits ont peu de poids face au récit. « Les prédictions démenties sont requalifiées en victoires occultes et les incohérences absorbées dans un raisonnement circulaire centré sur une seule certitude : il y a un complot ».
Plus largement, cette affaire rappelle à quel point le complotisme est enraciné dans la culture politique américaine. Et s’il fragilise temporairement certaines figures, comme Trump ou Alex Jones, il ne disparaît pas, « il se recompose, prêt à désigner de nouveaux ennemis et de nouveaux héros… Quitte à retourner ses armes contre ses propres architectes » conclut Julien Giry.
(Source : la Dépêche, 25.07.2025)
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