Le 19 janvier 2018, s’est ouvert devant la cour de Martinsburg (Virginie Occidentale) un procès qui devrait durer six à huit semaines. Il s’agit de déterminer si les dirigeants de l’Église locale et le siège national des mormons étaient au courant des agressions sexuelles commises par l’un de leur membre, Christopher Michael Jensen, et s’ils les ont couvertes.
Les six familles qui ont déposé plainte en 2013 affirment que Jensen, maintenant âgé de 26 ans, a abusé d’au moins neuf enfants. Pour elles, il ne fait aucun doute que les dirigeants de l’Église locale étaient informés et n’ont rien fait pour empêcher Jensen de nuire.
Condamné en 2013 à 35 et 75 ans de prison pour avoir abusé sexuellement de deux enfants, dont un âgé de seulement deux ans, Jensen était pourtant considéré comme un modèle pour les jeunes. Il avait la confiance de la communauté qui le recommandait régulièrement comme baby sitter.
Les enfants abusés en 2007 ont dévoilé les faits en 2012, mais Jensen était déjà connu pour d’autres agressions. En 2004, habitant alors l’Utah, il n’est âgé que de treize ans lorsqu’il est accusé, pour la première fois, d’agression sur deux jeunes filles de son collège. Les faits avaient été requalifiés en délit impliquant des enfants. Selon les plaignants, le Conseil supérieur du pieu1 de Martinsburg, dont les parents de Jensen étaient membres, aurait tenu une réunion, au cours de laquelle ses abus sexuels auraient été discutés.
L’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours se défend en arguant avoir mis en place un numéro pour signaler toute agression et empêcher les membres soupçonnés de maltraitances d’être en relation avec des enfants. Pourtant, lorsque la mère d’un garçon de quatre ans a signalé l’agression de son fils par Jensen, son évêque a soupçonné l’enfant d’avoir inventé les faits après avoir été exposé à une vidéo pornographique. Dans un autre cas, ce sont les parents eux-mêmes et les dirigeants de la congrégation locale qui ont dissimulé les faits à la police.
D’autres agressions ont eu lieu en 2012, alors que Jensen était déjà sous le coup d’une enquête criminelle. Rappelé comme missionnaire par l’Église, il a logé chez l’une des familles qui poursuivent l’Église avec l’assentiment de Steven Grow2, président de pieu, qui avait fait valoir que Jensen serait un bon exemple pour leurs enfants. Jensen aurait abusé des trois enfants de la famille. Grow s’est défendu en affirmant qu’il en savait trop peu sur l’enquête criminelle en cours à l’époque sur Jensen et que les nouvelles agressions signalées par la famille qui hébergeait Jensen n’étaient en fait que des effleurements accidentels.
D’autres affaires d’abus sexuels ont entaché d’autres leaders mormons. En Utah et en Californie, des évêques ont été reconnus coupables d’avoir agressé sexuellement des filles dans leurs quartiers. En Australie, c’est le leader d’un groupe de jeunes qui a été reconnu coupable d’abus sur des garçons dont il avait la responsabilité.
(Sources : The Journal, 28.12.2017 & The Washington Post, 18.01.2017)
1. Dans l’organisation mormone, un pieu est une division administrative englobant plusieurs paroisses et présidé par trois hommes.
2. Lui aussi sur le banc des accusés pour son rôle de président de la congrégation de Martinsburg.