EDITORIAL

Que Bulles consacre un numéro entier à la Scientologie ne peut étonner nos lecteurs. N’est-ce pas la secte qui donne lieu dans les médias au plus grand nombre d’articles, de comptes-rendus, d’ouvrages, de témoignages ? Elle met tout en œuvre pour vanter ses bienfaits et s’imposer avec audace. Dernièrement, les déclarations de la star Tom Cruise en faveur de la Scientologie, à l’occasion d’interviews devant faire la promotion de films, ont largement contribué à la diffusion des thèses effarantes de cette organisation.
Paradoxalement on peut donc s’interroger sur l’intérêt que nous avons de consacrer de nouveaux articles à ce mouvement, pardon, à cette nouvelle « église » ! En fait la multiplication de ses actions aujourd’hui, habiles moyens de prosélytisme, ne font qu’accentuer un danger que nous dénonçons depuis longtemps. Qui ne souscrirait en effet aux déclarations de la Scientologie quand elle s ‘élève contre l’usage de la drogue en faisant signer des pétitions dans les banlieues et quand elle fait la promotion auprès des jeunes de la défense des droits de l’homme ? Mais au-delà de cette quête fébrile de nouveaux adeptes dissimulée derrière un affichage de bonnes intentions, nous dénonçons un danger plus important : c’est celui que Paul Ariès a étudié dans un ouvrage percutant, paru en 1999, mais toujours d’actualité : La Scientologie, une secte contre la République. A la parution de ce livre, Bulles, dans trois numéros (n° 63,65,66) avait d’ailleurs publié de longs articles de Paul Ariès lui-même reprenant le contenu son l’ouvrage ; le chercheur démontrait magistralement, en s’appuyant sur les textes mêmes de l’organisation, que le gourou fondateur avait inventé des méthodes très éloignées de la démocratie. Paul Ariès intitulait ses chapitres : La Scientologie contre la Liberté, la Scientologie contre l’Egalité, la Scientologie contre la Fraternité.
Ce numéro a pour objectif de présenter les aspects dangereux, pour l’individu et pour la société, de la Dianétique et de la Scientologie à travers leur histoire et leur évolution. Si la secte en effet se contentait de conditionner ses propres adeptes, devenus « des esclaves heureux » , nous ne nous lasserions pas, bien sûr, puisque c’est notre premier rôle, de venir en aide à ces victimes et à leurs familles. Mais devant l’objectif de la secte d’appliquer son idéologie à la société entière, nous nous devons, avec l’aide des pouvoirs publics, de redoubler de vigilance.
Cette attitude, nous l’exerçons d’ailleurs non seulement vis à vis de la Scientologie mais vis à vis de toute entreprise sectaire manifestant une semblable volonté hégémonique et de déshumanisation.