Pour s’attirer fortune et pouvoir, certains monnaient cher cérémonies macabres ou trafics d’organes. À Yaoundé (Cameroun), pour la troisième fois en deux semaines, on a découvert le corps mutilé d’une jeune femme. Au nord de la Tanzanie, la police a procédé pour la énième fois à l’arrestation d’un couple de guérisseurs, meurtriers d’une albinos dont ils avaient prélevé les jambes après l’avoir massacrée.
Au sud du Nigeria, deux adolescents se sont sortis d’une tentative de décapitation après avoir été enlevés sur le chemin de l’école.
A Ibadan, troisième ville du Nigeria, une unité antigang a donné l’assaut dans une bâtisse abandonnée. À l’intérieur, un cauchemar de squelettes, de corps découpés, et quinze prisonniers enchaînés dans un état de malnutrition extrême.
De la Côte d’Ivoire à l’Afrique du Sud, du Togo au Kenya, des enfants, des handicapés, des adultes continuent de faire l’objet de crimes rituels et de trafics d’organes.
Un commerce très lucratif où les organes les plus prisés sont les plus chers : ceux des albinos, des métis, des Pygmées, des jumeaux et de leurs parents.
Partout, on observe un accroissement de ce type de criminalité à l’approche des échéances sociales et politiques. Au Gabon, au Cameroun, dans les deux Congo, en Afrique de l’Est, au Nigeria et jusqu’en Gui¬née-Bissau, la population vit alors un état de stress permanent. Cette psychose collective récurrente n’en est pas moins admise comme banale et culturellement intégrée par les populations.
Nombre de personnalités, occupant des postes importants dans la fonction publique, pensent que la sorcellerie leur a été favorable. Pour l’universitaire gabonais Joseph Tonda, il est courant, à Brazzaville, Libreville, Kinshasa ou Kampala, que la richesse des hommes d’affaires et le pouvoir des politiques soient appréhendés « sur le schéma de la mise à mort des autres et de leur consommation ».
Ce pouvoir que l’on détient après avoir « mangé » le principe vital d’une victime, voire de son propre enfant, explique souvent aux yeux de l’opinion l’ascension sociale, la fortune, ou encore le maintien indéfini sur le trône présidentiel.
Les crimes rituels sont une réalité qu’il convient de dénoncer et de punir, alors que la justice et la police sont trop souvent impuissantes, tétanisées voire complices face à ce phénomène en pleine expansion.
(Source : Jeune Afrique, François Soudan, 10.06.2014)