Recrudescence des exorcismes dans le monde

Début juillet 2017, Théos, un thinktank chrétien britannique, a publié un rapport intitulé « Le christianisme et la santé mentale » dans lequel figure une mise en garde sur la hausse des exorcismes en Grande Bretagne. Selon le rapport, elle serait due en grande partie aux communautés pentecôtistes d’origine africaine.

Le rapport prévient que cette pratique peut porter préjudice à des personnes ayant des problèmes de santé mentale car leur pathologie risque de ne pas être diagnostiquée et soignée. L’auteur du rapport, Ben Ryan, s’inquiète de la tendance des chrétiens à « aborder les problèmes de santé mentale sous un angle exclusivement spirituel » et à avoir recours à la prière plutôt qu’à la médecine pour soigner.

Le rapport évoque divers cas de jeunes femmes exorcisées dans des conditions très violentes et dont l’état de mal-être a empiré.

Les auteurs de ces crimes sont souvent des groupes évangéliques isolés croyants en la guerre contre les forces du mal. Pour eux n’importe quel péché peut être une invitation à la possession.

Les prêtres catholiques ont une approche différente du problème. Avant d’envisager un exorcisme ils envoient la personne chez un professionnel de santé qui évalue son état mental. La pratique a connu une augmentation très nette après la sortie du film L’Exorciste dans les années 1970. Face à ce regain d’activité, le Vatican a reconnu en 2014 l’Association internationale des exorcistes et organise des cours sur le sujet. En 2016, ce cours comptait 150 prêtres venant du monde entier, en 2017 ils étaient 250 à le suivre.

Selon une étude parue dans Le Monde, les demandes viennent de toutes les classes de la société, mais 75% sont des femmes, souvent battues ou victimes de violences sexuelles.
Le père Coquet, secrétaire général adjoint de la Conférence des Evêques confirme la tendance : le nombre d’exorcisme est passé de 15 à 50 par an à Paris où le diocèse reçoit à lui seul chaque année près de 2500 appels de personnes en souffrances.

En dehors de l’Église catholique, les exorcismes se pratiquent beaucoup au sein des communautés évangéliques africaines. Mais en France l’explosion de la demande a donné l’idée à des séculiers d’en faire un commerce lucratif. Internet regorge de ce genre d’offres. Certains proposent des cérémonies facturées 500 euros au cours desquelles, outre l’exorcisme, ils peuvent aussi chasser les esprits des maisons hantées, aider à trouver l’amour ou favoriser les affaires. Si certains de leurs clients éprouvent des difficultés dans ce dernier domaine, les leurs sont florissantes. Un exorciste de la région parisienne affirme qu’il gagne 12 000 euros bruts par mois en travaillant quinze heures par jour y compris par téléphone.

Selon The Economist cette pratique doit avant tout son succès aux croyances des clients. « En général ceux qui paient pour de tels rituels semblent croire qu’ils obtiendront un résultat, tout comme d’autres optent pour l’homéopathie ou l’astrologie en s’attendant à en retirer un avantage. Tout avantage supposé découle du fait que le client croit tout d’abord au service »
Étudiant le phénomène depuis plusieurs années, Adam Possamai, professeur de sociologie et de religion populaire à l’Université Western Sydney, conclut : « aujourd’hui, les gens sont plus intéressés par le côté émotif et enchanté de la vie que par le rationnel, ce qui conduit à la renaissance de la pensée magique ».

(Sources : The Guardian, 05.07.2017, Vice, 12.07.2017, Ulyces, 06.07.2017, The Economist, 31.07.2017 & National Catholic register, 10.08.2017)